À emprisonner chacun dans son rôle archétypal de musicien, on risquerait d'avoir tout faux. Tout d'abord parce que chacun aime à échanger cordes à gratter et à tirer, touches à caresser et enfoncer à moins qu'il se décide à souffler dans un tuyau. Il faut dire que les instruments qui accompagnent la voix d'Alex font autant partie de l'attirail classique du groupe de rock que de celui d'un orchestre de guinguette, qui aurait piqué les cuivres d'un cirque itinérant; sans oublier boites à sardine, roue de vélo et autre volet métallique.
Malgré un premier enregistrement en 2008 dans l'antre du garage français (Preacher Blues au mythique Kaiser Studio) , Le Skeleton Band cultive une certaine distance par rapport à la modernité du rock depuis son deuxième opus, le bien nommé Bella Mascarade qui sent plus le bois mouillé d'un bastingage que la sueur d'un pogo endiablé. Il sait bien que le diable n'a que faire des chapelles érigées par les hommes pour enfermer la musique dans leur petitesse d'esprit. Ce dernier s'est attaché aux personnages créés par le trio Montpelliérain et les accompagnera certainement jusqu'à leur dernière demeure, un peu plus loin dans la nuit.
La diversité des pistes explorées depuis 2007, de tournées des bars à l'étranger en BD concerts, de compositions pour le théâtre en ciné-concerts, a permis au groupe de façonner l'univers de La Castagne, savant équilibre entre le goût du Skeleton Band pour la musique d'accompagnement et le format chanson. Entendez par accompagner, non pas la montée en ascenseur vers le 7ème ciel, mais la lente perdition dans le bazar d'un cabinet de curiosités. Toute mélodie est tournée, tout son est remodelé, tout enchaînement est pensé de manière à faire se rencontrer les époques et les styles pour mieux emberlificoter l'auditeur. Lui-même se retrouve comme les personnages de la pochette, croqués par le dessinateur allemand Christoph Mueller, à la fois étonné et empoigné par un souffle épique qui le dépasse et finit par lui faire perdre toute contenance.
L'affrontement est au cœur de ce troisième album qui fait le grand écart à bien des niveaux. D'abord entre son lieu d'enregistrement (l'église romane Saint-Félix près de Béziers) et de mixage (la tour des Telecoms de Tucson, Arizona où opère Graig Schumacher, le sorcier derrière Calexico) pour obtenir un son "vaste et recueilli". Ensuite entre les hommages à Fréhel (citée dans "Joli Tendron") et à Barbara (à chercher en toute fin d'album) et la filiation évidente avec les bien vivants Vinicio Capossela et Arthur H. Enfin par les langages qui se suivent et ne se ressemblent - italien chafouin, anglais mélancolique et français d'une autre époque –pour conter les bleus et les bosses de l'existence … »
Cathimini (Site du Skeleton Band)
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